L’historien salue « un acte historique sans précédent » pour ces chrétiens d’Orient persécutés, après la reconnaissance du génocide assyrochaldéen de 1915-1918 par le Sénat le 8 février 2023 et par l’Assemblée nationale le 29 avril dernier.
LE FIGARO. - Dans votre dernier ouvrage, vous rappelez les liens très anciens entre les Assyro-Chaldéens et l’Occident chrétien. Mais ce peuple demeure méconnu. Qui sont-ils ?
JOSEPH YACOUB. - Les Assyro-Chaldéens se considèrent apparentés aux Assyriens, Babyloniens, Chaldéens et Araméens de l’antique Mésopotamie dont l’histoire remonte à plus de 5 000 ans. D’où le terme moderne d’Assyro-Chaldéen. Ils sont connus sous différentes dénominations qui résultent de divisions principalement religieuses. Ce sont les Églises comme institutions qui devinrent les protectrices de ce peuple, privé d’État depuis la chute de Ninive (-612) et de Babylone (-539), et son ciment d’unité. Ils sont chrétiens dès le départ, héritage de Thomas, l’apôtre du Christ, et ses disciples, et ont comme langue l’araméen syriaque dans lequel ils ont produit une littérature abondante. Leur christianisme est autochtone et apostolique, doté d’un droit canonique propre. Ce fut la première Église qui propagea le message chrétien dans le monde jusqu’aux Indes et aux confins de la Chine. Ils sont présents dans la littérature française, évoqués par Voltaire, dans l’Encyclopédie de Diderot, dans le Dictionnaire de Trévoux des pères jésuites, et chez Ernest Renan. Leur Bible (Peshitta) en syriaque et en chaldaïque figure dans les Bibles polyglottes à partir du XVIe siècle.
Quand et comment cette communauté s’est-elle implantée en France ?
Les premières traces sont lointaines et remontent à l’époque des Gaulois. Jacques d’Assyrie fut le premier évêque de la Tarentaise (capitale Moûtiers) au Ve siècle, et Abraham d’Euphrate, un des premiers moines qui s’établit dans le même siècle à Clermont (Auvergne), où il fonda le monastère Saint-Cyrgue. À sa mort, c’est Sidoine Apollinaire qui prononça son oraison funèbre. Dans l’histoire récente, leur immigration massive date des années 1980, venue principalement de Turquie, par la suite d’Irak, de Syrie, du Liban, d’Iran, fuyant l’oppression et les persécutions. Leur lieu principal de concentration c’est le département du Val-d’Oise, la ville de Sarcelles comme pivot central. Les Assyro-Chaldéens sont considérés comme un modèle d’intégration et d’acculturation.
Après la Première Guerre mondiale, les médias occidentaux évoquaient les massacres d’Assyro-Chaldéens par le pouvoir ottoman. Comment expliquer qu’ils soient ensuite tombés dans l’oubli ?
En effet, les massacres des Assyro-Chaldéens par le pouvoir ottoman durant la Première Guerre mondiale sont très présents à l’époque dans les médias occidentaux : Le Figaro, La Croix, Le Gaulois, la Gazette de Lausanne, L’Écho belge, le Manchester Guardian, le New York Times… Et ce peuple est défendu par d’éminentes personnalités comme Frédéric Masson, Denys Cochin, Léon Abensour, Arnold Toynbee, le vicomte James Bryce, lord Curzon, l’archevêque de Paris Léon-Adolphe Amette, et aussi par le Saint-Siège, l’OEuvre d’Orient, les Lazaristes et les Filles de la Charité, les Dominicains ou encore les missionnaires presbytériens américains et les anglicans. Membre de l’Académie française, l’historien Frédéric Masson écrit le 3 octobre 1916 dans L’Écho belge : « Mais il est une petite nation, la plus ancienne et la plus noble qui soit sur terre, qui risque de périr plus complètement que l’arménienne et dont nul ne parle : la nation chaldéenne. » Quant à l’historien Léon Abensour, il évoque « la résurrection de l’Assyrie et de la Chaldée ». L’intérêt fut grand jusqu’en 1925 et on a reparlé d’eux en 1933, lors des massacres perpétrés en Irak. Puis une chape de plomb s’est abattue. Comment expliquer cet oubli ? On peut relever plusieurs facteurs : les Assyro-Chaldéens n’étaient pas nombreux, donc moins influents, ils étaient dispersés et éloignés des centres de décision, et en outre géographiquement séparés les uns des autres avec la naissance de nouveaux États au Moyen-Orient, hostiles et dominés par des régimes à caractère nationaliste, arabe et turc. Enfin ils manquaient d’élites suffisantes, de plus inexpérimentées politiquement.
Comment la mémoire du génocide atelle quand même survécu ? Et comment est-elle revenue à la une de l’actualité en France, mais aussi à l’étranger ?
Outre le sens des martyrs cultivés par les Églises, les premiers remontant au IVe siècle, c’est essentiellement les familles qui ont transmis oralement la tragédie de 1915-1918, qu’on appelait « Seyfo » (année de l’Épée) et « Sefer berlik » (terme turc qui signifie « voyage de l’éloignement »). Mais c’est surtout dans la diaspora en Occident, à partir des années 1980, que le sursaut s’est fait par une prise de conscience, grâce à la liberté, à l’accès au savoir et à la culture. Les jeunes générations ont pu s’approprier leur héritage et la connaissance de ce qui s’est réellement passé en 1915-1918. Et ce fut le début du « printemps culturel et mémoriel ».
« Les Assyro-Chaldéens sont chrétiens dès le départ, héritage de Thomas, l’apôtre du Christ, et ses disciples, et ont comme langue l’araméen syriaque dans lequel ils ont produit une littérature abondante. Leur christianisme est autochtone et apostolique, doté d’un droit canonique propre »
Joseph Yacoub Professeur émérite de l’Université catholique de Lyon
Quelle est la portée de la reconnaissance du génocide par le Parlement français ? Et quelles pourraient en être les conséquences ?
Le 8 février 2023 et le 29 avril 2024, les Assyro-Chaldéens avaient rendezvous avec l’histoire. La tragédie génocidaire et ethnocidaire de 1915-1918 a été reconnue par la France. C’est à l’évidence un acte historique sans précédent, pour la vérité et la justice, qui honore la mémoire de ce peuple souffrant. La France a toujours été au rendezvous quand il s’agit de défendre les Assyro-Chaldéens et les chrétiens d’Orient en général. Les exemples ne manquent pas. Ici, je tiens à saluer François Pupponi, Bruno Retailleau, Valérie Boyer, Sylvain Maillard, Anne-Laure Blin et l’ensemble des sénateurs et des députés qui ont rendu cette reconnaissance possible par le Parlement français. Au niveau du gouvernement, le discours prononcé à l’Assemblée nationale par Chrysoula Zacharopouplou, secrétaire d’État chargée du Développement et des Partenariats internationaux, fut riche par sa clarté et le soutien apporté aux chrétiens d’Orient et aux malheurs subis par les Assyro-Chaldéens. Parce que c’est la France, le retentissement est mondial. Les messages que nous recevons encouragent les Assyro-Chaldéens à suivre le même chemin ailleurs.
Après le vote de l’Assemblée nationale, le ministère turc des Affaires étrangères a dénoncé « des accusations sans fondement juridique et historique ». Pensez-vous qu’Ankara reconnaîtra un jour les génocides arménien et assyro-chaldéen ?
Aujourd’hui, au sein de la société civile turque et dans les milieux intellectuels un mouvement se dessine, nonobstant les difficultés. Je pense en particulier à l’historien Taner Akçam, auteur de nombreux travaux sur les Arméniens comme, en 2006, A Shameful Act. The Armenian Genocide and the Question of Turkish Responsibility. Il est regrettable que les autorités turques s’obstinent dans leur politique de déni. La Turquie s’honorerait à reconnaître ces pages sombres qui sont imputables à l’Empire ottoman, avec lequel, à ce qu’on sache, la République turque, née en juillet 1923, a opéré une rupture. Quand on se penche sur l’histoire de la littérature turque, on constate qu’elle est riche en valeurs humanistes. Le poète Tevfik Fikret, qui a connu les communautés chrétiennes de son pays, écrit : « La terre est ma patrie, le genre humain ma nation. »
Au-delà du vote du Parlement français, quelle est la situation actuelle des chrétiens d’Orient ?
Je reprendrai ces paroles du discours de la ministre à l’Assemblée nationale le 29 avril : « L’histoire et la situation actuelle des chrétiens d’Orient nous obligent et exigent de nous un engagement sans faille. » Aujourd’hui, le malaise est profond en particulier en Irak, en Syrie et en Iran. Comment y remédier ? Cette question mérite une réflexion poussée et un examen à part. ■
Assyria
\ã-'sir-é-ä\ n (1998)
1: an ancient empire of Ashur
2: a democratic state in Bet-Nahren, Assyria (northern
Iraq, northwestern Iran, southeastern Turkey and eastern Syria.)
3:
a democratic state that fosters the social and political rights to all of
its inhabitants irrespective of their religion, race, or gender
4: a democratic state that believes in the freedom of
religion, conscience, language, education and culture in faithfulness to the
principles of the United Nations Charter —
Atour synonym
Ethnicity, Religion, Language
»
Israeli, Jewish, Hebrew
»
Assyrian, Christian, Aramaic
»
Saudi Arabian, Muslim, Arabic
Assyrian
\ã-'sir-é-an\ adj or n (1998)
1: descendants of the ancient empire of Ashur
2: the Assyrians, although representing but one single
nation as the direct heirs of the ancient Assyrian Empire, are now
doctrinally divided, inter sese, into five principle
ecclesiastically designated religious sects with their corresponding
hierarchies and distinct church governments, namely, Church of the
East, Chaldean, Maronite, Syriac Orthodox and Syriac Catholic.
These formal divisions had their origin in the 5th century of the
Christian Era. No one can coherently understand the Assyrians
as a whole until he can distinguish that which is religion or church
from that which is nation -- a matter which is particularly
difficult for the people from the western world to understand; for
in the East, by force of circumstances beyond their control,
religion has been made, from time immemorial, virtually into a
criterion of nationality.
3:
the Assyrians have been referred to as Aramaean, Aramaye, Ashuraya,
Ashureen, Ashuri, Ashuroyo, Assyrio-Chaldean, Aturaya, Chaldean,
Chaldo, ChaldoAssyrian, ChaldoAssyrio, Jacobite, Kaldany, Kaldu,
Kasdu, Malabar, Maronite, Maronaya, Nestorian, Nestornaye, Oromoye,
Suraya, Syriac, Syrian, Syriani, Suryoye, Suryoyo and Telkeffee. —
Assyrianism verb
Aramaic
\ar-é-'máik\
n (1998)
1: a Semitic language which became the lingua franca of
the Middle East during the ancient Assyrian empire.
2: has been referred to as Neo-Aramaic, Neo-Syriac, Classical
Syriac, Syriac, Suryoyo, Swadaya and Turoyo.